Comment encourager l’innovation dans la finance durable ?
Finance Responsable
Comment encourager l’innovation dans la finance durable ?
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13 Octobre 2021
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Sustainability
Temps de lecture : 5 minutes
Rares sont ceux qui sous-estiment aujourd'hui les défis environnementaux et sociaux auxquels est confrontée la planète : qu’il s’agisse de la pollution plastique, des émissions de carbone, de la pénurie d’eau ou d’aliments, la tâche qui nous attend est d’une ampleur et d’une urgence sans précédent. Le monde entier se mobilise pour répondre à ces enjeux.
Les avancées dans ces domaines nécessitent des financements supplémentaires, et surtout des projets dans lesquels investir. La finance a donc un rôle crucial à jouer pour dynamiser les impacts positifs (sociaux et environnementaux) conformément aux Objectifs de développement durable (ODD) des Nations Unies.
Créée en juillet 2019, la Commission Climat et finance durable de l’AMF a pour objectif de rassembler diverses parties prenantes sur le sujet de la finance durable.
Ses membres partagent les bonnes pratiques et les informations en la matière afin de développer des solutions innovantes et réalisables répondant aux enjeux environnementaux et sociaux.
La finance est le moteur de l’économie. Sans elle, il n’y a pas d’économie. Jour après jour, les problématiques environnementales gagnent en importance. Le monde a besoin de ce changement : un monde non durable signifie que l’économie ne fonctionne pas correctement, et si l’économie ne fonctionne pas correctement, le secteur financier a un problème
Le secteur est en passe de relever le défi. Dans le monde entier, les plus grands acteurs de l’investissement - fonds de pension, fonds souverains et d’assurance - intègrent de plus en plus les critères durables dans leur responsabilité fiduciaire. Parallèlement, les plus importants gestionnaires d’investissements mondiaux se sont mis à adopter des considérations sociales et environnementales dans leur analyse des entreprises et dans l’allocation de leur capital.
Ce processus a été grandement facilité par le développement de nouvelles indices et définitions. Les Objectifs de développement durable des Nations Unies ont permis d’obtenir des évaluations plus élaborées. Les investissements à impact se développent rapidement, même s’ils partaient d’un niveau très bas. En juin dernier, le Parlement européen a formellement adopté le Règlement sur la taxonomie verte de l’Union européenne.
Prévenir l'écoblanchiment
En dépit de ces avancées prometteuses, des obstacles persistent pour mobiliser les capitaux internationaux autour des objectifs de durabilité. Parmi eux figurent, sans s’y limiter, maintenir la confiance face à « l’écoblanchiment » (greenwashing), se tenir au fait du savoir-faire scientifique, et élaborer une réglementation solide conciliant les intérêts des investisseurs et des gestionnaires d’actifs.
Face à ces enjeux, le secteur financier doit être à la fois proactif et réactif. Il a une carte à jouer dans l’élaboration d’une réglementation efficace.
Thierry précise : « La Commission a été créée pour contribuer à élever le niveau de connaissances et permettre à l’AMF de définir une politique adaptée. Elle a cherché à instaurer une représentation équilibrée entre les investisseurs, les émetteurs, les experts (universitaires et groupes de réflexion), et les représentants de la société civile. Nous avions besoin de personnes constructives. Nous ne pouvions donner des conseils avisés sans représentation de l’ensemble des acteurs ».
Ardian, société d’investissement privé et membre de la Commission, a été un pionnier dans le domaine de la finance durable.
Dans le monde entier, nous sommes actionnaire dans plus de150 sociétés et investissons dans plus de 1 600 fonds qui, à leur tour, investissent dans des milliers d’activités sous-jacentes. Cela nous offre une portée considérable et nous estimons avoir une responsabilité majeure pour mettre la finance durable au service de la société. Ce type de plateforme collaborative est très important
Selon Candice, trois problématiques principales marqueront l’avenir de la finance durable. La première est l’impact et sa mesure. Nous sommes de plus en plus conscients de l’importance de mesurer les résultats des efforts ESG et de veiller à leur impact sur le monde réel. Les Nations Unies et l’Impact Management Project proposent une base solide pour y parvenir, mais il reste encore beaucoup à faire. Candice ajoute : « Ces deux dernières années, nous avons massivement investi pour améliorer la mesure de la contribution de nos investissements aux enjeux sociaux et environnementaux. Nous y sommes parvenus en incorporant les ODD des Nations Unies à notre propre cadre de mesure. Cette étape importante nous permettra d’accélérer la transformation dans un vaste panel d’entreprises ».
La deuxième problématique est l’écoblanchiment. « En matière de durabilité, les notations et analyses doivent être fiables et dignes de confiance. S’il s’installe, l’écoblanchiment peut être un obstacle majeur au développement du secteur », poursuit Candice.
La troisième problématique est celle de la promotion de la diversité et de l’inclusion. Elle affirme : « Nous devons promouvoir une plus grande égalité des chances dans le secteur de la finance, mais également encourager une réflexion plus large et l’émergence d’idées nouvelles ».
La durabilité, nouvelle normalité
Elle ajoute : « Ardian a su devenir un acteur majeur du secteur de l’investissement privé, mais il n’est qu’un élément parmi tant d’autres du secteur de la finance mondiale. Pour permettre les changements nécessaires à la construction d’une économie durable et inclusive, nous devons impliquer les investisseurs à grande échelle. C’est pourquoi il est si important de travailler ensemble. L’objectif de la Commission est d’accompagner et d’accélérer cette dynamique en faisant des propositions ambitieuses et pragmatiques ».
« Tout est encore très confus et de nombreuses questions se posent. À nos yeux, il s’agit de comprendre la contribution qui peut être apportée grâce à la finance durable, en élaborant un langage commun et des outils mutuels qui contribuent à son développement ».
Comment la Commission définira-t-elle le succès ? Thierry précise : « Le succès consiste à disposer d’une réglementation qui fasse la différence et qui soit applicable. Nous voulons nous assurer que la durabilité ait un sens. À terme, nous souhaitons garantir qu’elle devienne la nouvelle normalité des institutions financières ».
Ces objectifs sont certes ambitieux, mais le secteur a déjà obtenu de bons résultats en très peu de temps et, désormais, une véritable dynamique l’anime.